El Guiniguada, 32 (2023), pp. 13-26

Print ISSN: 0213-0610 – eISSN: 2386-3374


Servicio de Publicaciones y Difusión Científica Universidad de Las Palmas de Gran Canaria Facultad de Ciencias de la Educación

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Servicio de Publicaciones y Difusión Científica (SPDC) de la Universidad de Las Palmas de Gran Canaria.

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Facultad de Ciencias de la Educación Las Palmas de Gran Canaria, España

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El Guiniguada

(Revista de investigaciones y experiencias en Ciencias de la Educación)

eISSN: 2386-3374

10.20420/ElGuiniguada.2013.333 (doi general de la revista)


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L’espagnol et le portugais comme langues étrangères en Côte d’Ivoire

Spanish and Portuguese as Foreign Languages in Ivory Coast


Koffi Yao

Bi Drombé Djandué

Université Félix Houphouët-Boigny Abidjan, Costa de Marfil


DOI (en Sumario/Título Plataforma Revista)

Recibido el 17/08/2022 Aceptado el 30/04/2023


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4.0 Internacional License.

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L’espagnol et le portugais comme langues étrangères en Côte d’Ivoire1

Spanish and Portuguese as foreign languages in Ivory Coast

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Koffi Yao koffi.yao44@ufhb.edu.ci Bi Drombé Djandué djandue.bi@ufhb.edu.ci

Université Félix Houphouët-Boigny. Abidjan, Costa de Marfil


RÉSUMÉ

Nous analysons les implications, pour l’espagnol en Côte d’Ivoire, de l’intégration du portugais dans l’éducation secondaire. Depuis la création de l’enseignement secondaire sur le modèle de l’ex puissance coloniale vers la fin des années 1940, l’anglais, l’espagnol et l’allemand sont les trois langues étrangères au programme des lycées et collèges ivoiriens. La Côte d’Ivoire et le Portugal ayant signé en 2015 un protocole d’accord en vue de l’intégration du portugais, il est probable que le statu quo ne soit plus de mise dans les années à venir. En plus d’être de la même famille néolatine que l’espagnol, le portugais bénéficie d’une plus grande présence sur le continent africain en tant que langue officielle de cinq pays. Son intégration aura l’avantage de créer une concurrence bénéfique aux acteurs et d’offrir de nouvelles opportunités dans un monde de plus en plus globalisé.


MOTS-CLÉS

ENSEIGNEMENT, APPRENTISSAGE, LANGUES ÉTRANGÈRES, HISTOIRE, CULTURE


ABSTRACT

We analyze the implications for Spanish in Ivory Coast of the integration of Portuguese into secondary education. Since the creation of secondary education on the model of the former colonial power in the late 1940s, English, Spanish and German have been the three foreign languages on the curriculum of Ivorian high schools and colleges. As Ivory Coast and Portugal signed a memorandum of understanding in 2015 to integrate Portuguese, it is likely that the status quo will no longer be the case in the coming years. In addition to being a member of the same neolatin family as Spanish, Portuguese has a greater presence on the African continent as the official language of five countries. Its integration will have the advantage of creating competition that will benefit the players and offer new opportunities in an increasingly globalized world.


KEYWORDS



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1 Cet article a fait l’objet d’une communication, sous le titre « L’espagnol face à la perspective de l’instauration du portugais dans le système éducatif ivoirien », au Colloque International Pluridisciplinaire organisé par l’Institut de Linguistique Appliquée d’Abidjan et le Laboratoire de Recherche en Communication, Langues et Sciences Humaines, à l’INPHB de Yamoussoukro, du 20 au 22 novembre 2019.


TEACHING, LEARNING, FOREIGN LANGUAGES, HISTOIRE, CULTURE


INTRODUCTION

En héritant du système éducatif français à l’image de l’ensemble des pays francophones d’Afrique, la Côte d’Ivoire a également hérité de l’enseignement de l’allemand et de l’espagnol comme seconde Langue vivante (LV2) à partir de la classe de Quatrième. L’anglais, première Langue vivante (LV1), est au programme pour tous les apprenants dès la Sixième. Ailleurs, notamment dans l’ancienne Métropole, l’offre de langues étrangères s’est diversifiée avec le temps. Ainsi, depuis les années 1970, le portugais bénéficie en France d’un « cursus complet, un CAPES et une Agrégation » (Penjon, 2019). Sur le continent même, l’élève sénégalais de Quatrième peut également choisir le portugais (Ndoye, 2007 ; Kem-Mekah, 2016, p. 52).

En Côte d’Ivoire, cependant, la situation n’a que très peu évolué, voire pas du tout (Koffi, 2004 ; Koffi et al., 2021, p. 1770). Plus de sept décennies après la création de l’éducation secondaire, aucune autre langue de communication internationale n’a rejoint l’allemand et l’espagnol dans les programmes scolaires ivoiriens, officiellement et à grande échelle tout au moins. Toutes choses qui font dire à P. Désalmand (2004) ce qui suit :


La priorité donnée à l’anglais, du fait de l’importance de cette langue dans le domaine de la recherche scientifique et sur le continent africain, apparaît comme l’option la plus souhaitable, mais, dans une perspective africaine, il aurait peut-être été intéressant de donner une place aux enseignements du portugais, de l’arabe et des langues africaines. D’une façon plus générale, les objectifs de l’enseignement des langues secondes gagneraient à être précisés. (Désalmand, 2004, p. 433)


Dans une perspective panafricaine donc, la langue de Camões ne serait pas de trop dans le secondaire ivoirien, bien au contraire. L’ayant peut-être compris, la Côte d’Ivoire a signé avec le Portugal, le 18 juin 2015, un protocole d’accord en vue de l’instauration du portugais dans le système éducatif ivoirien. Presque quatre ans jour pour jour plus tard, soit le 14 juin 2019, le Président portugais, Marcelo Rebelo de Sousa, est accueilli à l’Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan à la faveur d’une visite d’État de 72 heures. Lors de cette visite, il a été convenu qu’« En ce qui concerne l’éducation et la langue, la présence du portugais en Côte d’Ivoire doit pouvoir se développer assez rapidement » (Yao, 2019).

Dans un article publié en 2004, Koffi Tougbo, premier spécialiste ivoirien de la langue de Camões, émettait le vœu ardent de voir le portugais occuper toute sa place en Côte d’Ivoire, « se développer et se vulgariser en gagnant, sans attendre, les différents cycles de l’enseignement secondaire, à l’image de l’anglais, de l’espagnol et de l’allemand ». Pour lui, en effet, « l’avenir de la langue portugaise dans notre pays est prometteur », « il faut [donc] décloisonner son enseignement en l’emmenant à dépasser les balises du cadre unique de l’Université où il s’est jusque-là cantonné. La Côte d’Ivoire compte, dans l’enseignement secondaire, plusieurs milliers d’élèves germanistes et hispanisants. Le portugais n’en compte aucun pour le moment. Il faut […] y remédier » (Koffi, 2004, p. 86-87). D’autant plus qu’à ses yeux,


Cette langue offre une chance supplémentaire certaine à une époque où la plupart des secteurs d’emplois semblent saturés. L’interprétariat, la diplomatie, le tourisme, le secrétariat trilingue, l’enseignement et l’embauche dans des entreprises lusophones implantées dans nos pays francophones sont, entre autres, des secteurs pouvant absorber nos diplômés les plus performants, contribuant ainsi, à la recherche de solutions durables au phénomène des littéraires au chômage dans nos pays. (Koffi, 2004, p. 79)


Le premier questionnement qu’appelle cet optimisme partagé est de savoir quelles en sont les raisons objectives. Ainsi, d’une part, quels sont les facteurs linguistiques, historiques et culturels favorables au développement rapide du portugais en Côte d’Ivoire, et, d’autre part, quel pourrait être l’impact d’un tel développement sur l’enseignement de l’espagnol ? Nous nous intéressons à la question parce que l’espagnol et le portugais sont deux langues sœurs et qu’à moyen ou long terme, le fait que les élèves ivoiriens aient à choisir la seconde langue vivante entre l’espagnol, l’allemand et le portugais ne sera pas sans conséquences, surtout pour le premier.

Afin d’apporter des réponses à ces questions de recherche, nous mènerons la réflexion en trois points, en commençant par dresser un état des lieux de l’enseignement- apprentissage de l’espagnol et du portugais en Côte d’Ivoire. Nous nous attèlerons ensuite à relever les forces et les faiblesses des langues en présence dans le contexte ivoirien. Avant de conclure la contribution, le troisième et dernier point lèvera le voile sur une certaine rivalité historique Espagne-Portugal remise symboliquement au goût du jour dans le système éducatif ivoirien dès l’adoption d’un cursus pédagogique complet pour le portugais, comme il en existe pour l’espagnol depuis plus d’un demi- siècle.


SITUATION ACTUELLE DE LESPAGNOL ET DU PORTUGAIS EN CÔTE D’IVOIRE

Comme cela se perçoit à l’échelle du monde, l’espagnol et le portugais n’ont pas la même visibilité en Côte d’Ivoire. L’un jouit d’une longue trajectoire dans l’éducation secondaire et supérieure ; l’autre, d’une présence discrète en milieu universitaire uniquement.


L’espagnol comme langue étrangère en Côte d’Ivoire

Instauré presqu’en même temps que l’éducation secondaire à la fin de la décennie 1940, l’espagnol a supplanté l’allemand au début des années 1980 en nombre d’enseignants et d’apprenants pour devenir, depuis cette date, la deuxième langue étrangère la plus étudiée en Côte d’Ivoire après l’anglais (Koffi, 2009 ; Quiñones, 1995). Son apprentissage commence encore officiellement en classe de Quatrième, mais certains établissements privés ou publics s’y mettent dès la Sixième, le plus emblématique d’entre tous étant le Lycée d’Excellence Alassane Ouattara de Grand- Bassam2 ouvert en 2019. S’ils étaient 795.488 apprenants pour l’année scolaire 2020- 2021 (Yao, 2021), on peut considérer qu’aujourd’hui le nombre des élèves étudiant l’espagnol dans l’éducation secondaire ivoirien dépasse les 800.000, ce qui fait de la Côte d’Ivoire le numéro 1 africain en la matière (Instituto Cervantes, 2021).

Pour l’enseignement supérieur, Dago (1993), ancien directeur du Département d’espagnol de l’Université d’Abidjan, et Quiñones (1995), lectrice espagnole dans les années 1990, sont des références fiables. On a commencé à enseigner l’espagnol


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2 Ce lycée porte en effet, depuis sa création, le nom de l’actuel président de la République de Côte d’Ivoire.


comme option au Département de Lettres modernes, avant d’ouvrir un Département d’espagnol rattaché à l’ex FLASH (Faculté des Arts, Lettres, et Sciences Humaines) en 1969. Les étudiants pouvaient y étudier la philologie hispanique jusqu’au doctorat. En 1975, il y avait 04 enseignants au Département d’espagnol, dont trois Ivoiriens et un Espagnol ; en 1982, 14, dont 06 étrangers. Du côté des étudiants, on en comptait

1.050 ; 1.000 autres apprenant la langue en option dans d’autres départements. Depuis, les choses ont énormément évolué, tant qualitativement que quantitativement. D’une part, l’offre de formation s’est diversifiée avec deux nouveaux parcours (Études Hispano-africaines et Linguistique-Didactique) ajoutés à « Espagne Moderne » et « Études Latino-Américaines ». D’autre part, un nouveau département d’espagnol a été ouvert en 1994 dans une autre université, celle de Bouaké créée deux ans plus tôt. La Côte d’Ivoire est, là encore, le premier pays africain abritant le plus grand nombre d’étudiants d’espagnol et de docteurs dans différentes spécialités rattachées à la langue de Cervantès (Djandué, 2018).

Aujourd’hui, en utilisant les nouvelles dénominations de ces institutions, le Département d’Études Ibériques et Latino-Américaines (Université Félix Houphouët- Boigny d’Abidjan), le Département d’Espagnol (Université Alassane Ouattara de Bouaké) et l’École Normale Supérieure d’Abidjan, qui abrite une Section Espagnol dédiée à la formation des professeurs d’enseignement secondaire, comptabilisent au moins 60 enseignants-chercheurs et plus de 5000 étudiants, des chiffres en constante évolution. Au nord du pays, l’Université Péléforo Gon Coulibaly de Korhogo, où l’espagnol est enseigné en option dans plusieurs départements, abritera peut-être, dans les années à venir, le troisième département d’espagnol en Côte d’Ivoire.

Au total, voici plus de sept décennies que l’espagnol est enseigné comme langue étrangère en Côte d’Ivoire, avec une continuité qui fait dire à Djandué (2021) que son apprentissage y est devenu aussi banal que consommer de l’attiéké3. Cette longue présence en fait, par ailleurs, la deuxième langue internationale, après l’anglais, à alimenter le nouchi4 et à inspirer ses locuteurs dans leurs différents procédés de lexicalisation (Yao, 2015 ; 2017). Le phénomène sociolinguistique de l’hispanisation des surnoms chez les jeunes, sous l’influence conjuguée de la musique, des telenovelas et du football (Djandué & Yapi, 2022), témoigne également d’un certain niveau de pénétration de l’espagnol dans la culture populaire ivoirienne en ce XXIe siècle entamé.


Le portugais comme langue étrangère en Côte d’Ivoire

Dans un article intitulé « L’enseignement/apprentissage du portugais en Côte d’Ivoire: actualité et perspectives », Koffi (2004) dresse un état des lieux presque exhaustif de la situation du portugais comme langue étrangère dans ce pays africain. Le premier constat qui s’en dégage est que, à l’opposé de l’espagnol qui y a fait son entrée par le bas (du secondaire vers le supérieur), le portugais entre dans le système éducatif ivoirien par le haut, puisqu’il n’est présent qu’en milieu universitaire, en attendant un jour son intégration effective dans l’éducation secondaire.

Ainsi, la langue portugaise est introduite dans l’enseignement supérieur de Côte d’Ivoire en 1979, soit dix ans après l’espagnol, pour former plus tard avec lui le


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3 L'attiéké est un mets traditionnel ivoirien à base de manioc.

4 Argot ivoirien né dans les années 1980 et qui, basé sur la structure syntaxique du français, la langue

officielle de la Côte d’Ivoire, emprunte des mots et des expressions aux parlers endogènes et à des langues internationales telles que l’anglais, l’espagnol ou l’allemand.


Département d’Études Ibériques et Latino-Américaines de l’Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan. Elle a d’abord été enseignée comme « langue d’option avec régulièrement une dizaine d’étudiants de 1979 à 1984 […] à plus de 500 apprenants en 1999, puis à plus de 2 170 en 2003/2004 », aussi bien à l’Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan qu’à l’Université Alassane Ouattara de Bouaké (Koffi, 2004, p. 75).

En 1998, face à l’importance de la demande et aux effectifs très élevés, le Conseil de Faculté saisit le Conseil d’Université afin que celui-ci se penche sur la création d’une Licence de Portugais, ce qui sera fait l’année suivante. L’année académique 2000- 2001 voit ainsi arriver les premiers bacheliers orientés en Portugais à l’Université d’Abidjan. Depuis lors, le flux ne s’est plus interrompu (Koffi, 2004, p. 77). En plus du statut de langue d’option (LV2) dispensée à des groupes d’étudiants d’autres départements à l’Université Félix Houphouët-Boigny et à l’Université Alassane Ouattara, le portugais est donc, depuis un peu plus de deux décennies maintenant, une langue de spécialité (LV1) avec une cinquantaine d’étudiants régulièrement inscrits chaque année de la Licence au Master5.

Si l’enseignement du portugais en Côte d’Ivoire bénéficie de l’appui constant du Brésil, du Portugal et de l’Institut Camões, il souffre encore d’un manque important d’enseignants pour répondre efficacement à la demande. Ils ne sont que 06 au Département d’Études Ibériques et Latino-Américaines, dont 05 nationaux. L’absence d’un relai à l’École Normale Supérieure, combinée avec ce déficit d’enseignants, explique l’effectif encore très modeste d’étudiants orientés en Portugais à l’université. Après leurs études, en effet, les quelques personnes qui s’y aventurent n’ont d’autres débouchés que les ambassades ou des bourses pour continuer dans des pays lusophones. Au pire des cas, elles abandonnent carrément la filière.

L’intégration du portugais dans l’éducation secondaire ivoirienne apparaît d’autant plus urgente, dès lors, qu’elle a pour enjeu principal la réparation d’un paradoxe, voire d’une injustice qui n’a que trop duré. Sachant pertinemment que le métier de professeur de collège ou de lycée est le premier débouché sur le marché de l’emploi pour les étudiants de toutes les langues étrangères en Côte d’Ivoire (anglais, espagnol, allemand), il y a bien longtemps que l’École Normale Supérieure d’Abidjan devait aussi disposer d’une Section Portugais dans son département des langues. Sans la création de ce cursus complet, continuer d’orienter des bacheliers en Portugais ressemblera encore à “un assassinat collectif programmé”.

Mais il y a des raisons d’espérer une évolution positive de la situation de la langue de Camões en Côte d’Ivoire dans un futur sans doute plus proche aujourd’hui. Un peu de bonne volonté politique ajoutée au protocole d’accord signé par la Côte d’Ivoire et le Portugal le 18 juin 2015 pourra suffire à faire du rêve une réalité. En outre, plusieurs arguments, et non des moindres, militent en faveur d’un élargissement de l’enseignement de la langue portugaise dans le système éducatif ivoirien.


FORCES ET FAIBLESSES DES LANGUES EN PRÉSENCE

Dans la compétition qui se profile à l’horizon dans le secteur ivoirien de l’éducation- formation, autant l’espagnol que le portugais a des points forts et des points faibles.


5 Pour l’année académique 2020-2021, par exemple, la Section Portugais du Département d’Études Ibériques et Latino-Américaines de l’Université Félix Houphouët-Boigny comptait 35 étudiants en Licence 1, 11 en Licence 2, 04 en Licence 3 et 07 en Master 1 et 2. (Chiffres fournis par l’administration du Département).


Quel est le poids de l’une et l’autre langue dans le monde en général et en Côte d’Ivoire en particulier ? Dans les lignes qui suivent, nous les comparons premièrement à travers des données démolinguistiques, et ensuite, sous l’angle sociolinguistique.


Données démolinguistiques

L’espagnol est la langue officielle de 21 pays dont 19 se trouvent en Amérique, 01 en Europe (Espagne) et un autre en Afrique : la Guinée Équatoriale. Selon des chiffres récents (Instituto Cervantes, 2022, p. 5), plus de 496 millions de personnes parlent l’espagnol comme langue maternelle et plus de 24 millions d’autres l’étudient comme langue étrangère. Ces chiffres en font la deuxième langue maternelle au monde après le mandarin et la quatrième en mettant dans la balance tous les profils de locuteurs, avec 595 millions de personnes, soit 7,5 % de la population mondiale. Tant et si bien que, pour Fernández González, Fernández Vítores, Gutiérrez Rivilla et Serrano Avilés, « El español se integra en [el] grupo de lenguas grandes, con notable peso específico » (2023, p. 7), et il s’agit d’abord et avant tout du poids démographique.

De son côté, le portugais revendique plus de 250 millions de natifs ; troisième langue européenne la plus parlée derrière l’anglais et l’espagnol et septième au plan mondial (Éditions Assimil, 2017). 10 pays dont 06 africains l’ont comme langue officielle : le Mozambique, l’Angola, la Guinée-Bissau, le Cap-Vert et Sao Tomé-et-Principe, auxquels s’est ajoutée, depuis 2014, la Guinée Équatoriale devenue membre de plein droit de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP) (Darrigol, 2016).

Au bilan, en dehors de la modeste Guinée Équatoriale, un petit pays (28  050 km²) de moins de deux millions d’habitants en 2020, aucune nation en Afrique ne parle l’espagnol comme langue officielle. La Guinée Équatoriale s’en trouve d’ailleurs dans une situation d’isolement linguistique dont elle tente de desserrer l’étau en faisant du français et du portugais ses langues cofficielles (Darrigol, 2016). Cela fait dire à Koffi (2004, p. 78) que le portugais « est, hormis le français, la plus africaine des langues neo-latines ».

Pour promouvoir à l’étranger l’espagnol et le portugais et les cultures qu’elles portent, l’Espagne a créé l’Institut Cervantès en 1991 et le Portugal, l’Institut Camões en 1992. Cependant, l’anglais et l’espagnol sont les deux langues les plus étudiées actuellement dans le monde comme langues étrangères (Hubert, SA). Cela dit, par rapport à leurs distributions géographiques respectives, l’espagnol ouvre la Côte d’Ivoire à une partie du monde pendant que le portugais l’ouvre d’abord à une partie de l’Afrique.


Aspects sociolinguistiques

La croissance et le prestige d’une langue s’évaluant aussi par son attrait auprès des gens (Hubert, SA), il est certain que plus d’un demi-siècle d’enseignement ininterrompu ont fortement contribué à construire chez l’ensemble des Ivoiriens une image de l’espagnol et de sa culture (Djandué, 2012, Lalékou, 2021). Au même titre que l’apprentissage scolaire, la musique internationale, le football et les telenovelas (Diomandé, 2020) ont apporté beaucoup à la construction de cette image qui a évolué positivement au cours de l’histoire.

Il en a résulté des phénomènes sociolinguistiques tels que l’incorporation de termes espagnols dans l’argot ivoirien dénommé nouchi et l’hispanisation susmentionnée des


surnoms chez les jeunes (Djandué & Yapi, 2022). Concernant les hispanismes dans le

nouchi, en particulier, en voici un échantillon assez représentatif:


Tableau 1. Quelques hispanismes dans le nouchi

Emprunt lexical

Signification

Terme espagnol

Exemple d’énoncé en nouchi

Adios [adiɔs]

Au revoir

Adiós

Adios frero!

Amigo [amigo]

L’ami

Amigo

Amigo, Késhia?

Como [komo]

Comment

Cómo

C´est como?

Coché [koʧe]

La voiture

Coche

Est-ce que t’as vu la coché ?

Madré [madre]

La mère

Madre

La madré est calé.

Padré [padre]

Le père

Padre

Mon padré est po.

Vida [vida]

La vie

La vida

C’est la vida ; on va faire comment ?

Source: Elaboré à partir des données de Yao Koffi (2017, p. 122)


Si, à l’état actuel des choses, l’Ivoirien lambda ne fait pas systématiquement la relation avec la langue portugaise quand il entend parler du roi Pelé (footballeur brésilien) ou de Cristiano Ronaldo (footballeur portugais), ou encore lorsqu’il regarde des telenovelas telles que Dona Beija (Brésil, 1986), Terra Nostra (Brésil, 1999) ou Mara, une femme unique (Portugal, 2015), un temps diffusées par la télévision nationale ; il n’est pas exclu que, le moment venu, le portugais profite également de ces éléments de la culture populaire pour se promouvoir dans l’opinion et dans les cœurs en Côte d’Ivoire.

D’ailleurs, dans le domaine spécifique du football, il n’aura échappé à personne que certains joueurs ivoiriens se font surnommer Gervinho (Gervais Yao Kouassi) ou Kalunho (Salomon Armand Magloire Kalou). Or, ce type de construction est typique de la langue portugaise dans laquelle l’association des consonnes N et H (NH) correspond effectivement au français GN et à l’espagnol Ñ ; d’où, par exemple, Ronaldinho (footballeur brésilien) ou Mourinho (entraîneur portugais de football).

Par ailleurs, historiquement, les Portugais furent les premiers explorateurs européens à fouler les côtes occidentales d’Afrique au XVe siècle et, par ricochet, le sol ivoirien. Selon Koffi (2004, p. 78), « les centaines de toponymes, hydronymes et emprunts lexicaux lusitaniens attestés dans nos pays et dans les langues locales [en] sont autant de preuves palpables ». Dans sa thèse de doctorat consacrée à ce sujet, on trouve les toponymes et hydronymes suivants en ce qui concerne la Côte d’Ivoire:


Tableau 2. Toponymes et hydronymes dérivés du portugais en Côte d’Ivoire


Dérivés du portugais

Termes portugais d’origine


Toponymes (noms de villes)

Tabou

Tabú

San Pedro

São Pedro

Sassandra

Santo André

Fresco

Fresco

Grand Lahou

Rio do lago

Grand Bassam

Rio da Bassa (créole portugais)


Hydronymes (noms de fleuves)

Cavally

Restinga do cavalo

Sassandra

Rio de Santo André

Bandama

Banda má

Bia

Rio da bahia

Source : Elaboré à partir des Annexes de la thèse de Koffi Tougbo (2010, p. 299-300)


La dénomination de « Côte d’Ivoire » serait même la traduction en français du nom portugais « Costa do Marfim » donné par les commerçants navigateurs en route vers


l’Inde, et qui apparaît sur les portulans portugais à la fin du XVIIe siècle6. À ces toponymes, on peut ajouter de nombreux emprunts lexicaux au portugais dans des langues locales ivoiriennes telles que le dida ou l’agni:


Tableau 3. Emprunts lexicaux (lusitanismes) au portugais dans des langues locales ivoiriennes


Signification en français

Terme portugais

Signification en français


Dida

àlákà

La caisse

Arca

Arche, caisse

kãnja

Lanterne

Candéia

Chandelier

àziglǐ

Le sucre

Açúcar

sucre

fʋ́flʋ

La feuille

Folha

feuille

kpãw

Le pain

Pão

pain


Agni

àlákà

La caisse

arca

Arche, caisse

bàlίkό

Fût, tonneau

barriga

ventre

kãvja

Lampetempête

candéia

Chandelier

kpãw

Le pain

pão

pain

platja

L’argent

prata

Argent

Source : Elaboré à partir des Annexes de la thèse de Koffi Tougbo (2010, p. 291, 293, 295)


Ainsi, les hispanismes pénètrent le tissu linguistique ivoirien par le haut en prêtant des termes à un argot né dans les années 1980 (Koffi, 2013), en provenance notamment des milieux scolaire et universitaire (Djandué & Toa, 2019) ; les lusitanismes, eux, pénètrent ce tissu linguistique plutôt par le bas en influençant directement des langues locales dans leur structure lexicale. Une telle donnée est potentiellement de nature à faire entrer le portugais dans le cœur des Ivoiriens au point de favoriser aussi, le moment venu, son choix par de nombreux élèves au secondaire.


LA RIVALITÉ ESPAGNE-PORTUGAL REMISE AU GOÛT DU JOUR

Quand on a relevé tous ces éléments d’analyse, il est difficile de ne pas voir bientôt transposée dans le système éducatif ivoirien, ne serait-ce que de façon symbolique, la rivalité historique entre l’Espagne et le Portugal. Le Traité de Tordesillas constitue le meilleur symbole politique de cette rivalité. Qu’en est-il réellement ?


Le traité de Tordesillas

Si les Portugais furent les premiers à fouler les côtes de l’Afrique occidentale au XVe siècle, on doit à l’Espagne la découverte de l’Amérique puisque, le roi du Portugal ayant refusé d’aider Christophe Colomb, ce sont les monarques espagnols, Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon, qui financèrent l’expédition qui, vers la fin du même siècle en 1492, permit de trouver un “Nouveau Monde” (Thomas, 2016, p. 2). Le Portugal ne s’en intéresse pas moins au fruit inespéré de cette expédition.

Afin de prévenir les conflits dans la perspective de la conquête et de l’exploitation des richesses du nouvel Eldorado, les royaumes du Portugal et d’Espagne, les deux puissances européennes de l’époque en raison de leur supériorité technologique en matière navale, conviennent d’un arrangement territorial consigné dans le Traité de Tordesillas ratifié en 1494 sous l’égide du Pape Alexandre VI, et confirmé plus tard par le Pape Jules II en 1506 (Bouopda, 2010, p. 18 ; Dago, 2014, p. 13).

Une ligne de démarcation fut ainsi tracée, partageant le monde en deux zones dont l’une espagnole, située au plan méridien de longitude Ouest 46° 37’, soit environ 1770 km à l’Ouest des îles du Cap-Vert ; l’autre portugaise, située à l’Est de cette



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6 https://fr.wikipedia.org/wiki/C%C3%B4te_d%27Ivoire, 16/04/2022.


ligne verticale (Bouopda, 2010, p. 18). Voici donc comment « España volvió definitivamente la espalda a África » (Dago, 2014, p. 13; 2015, p. 7). En tournant ainsi définitivement le dos à l’Afrique, l’Espagne laissa le champ libre au Portugal.

Mais, ce traité n’engageant que ses signataires malgré l’onction pontificale (Bouopda, 2010, p. 18), les autres puissances européennes entrent bientôt dans le jeu. Elles disputent âprement l’Amérique à l’Espagne et l’Afrique au Portugal. Il ne restera finalement à l’un que 19 pays en Amérique, et, à l’autre, cinq pays en Afrique. La Côte d’Ivoire est donc forcément l’un des territoires perdus ou cédés par le Portugal à ses concurrents. Du coup, la perspective de l’intégration du portugais dans son système éducatif fait souffler comme un air de Tordesillas.


Comme un air de Tordesillas

Au moment où l’on s’apprête peut-être à donner une place plus importante à la langue portugaise en Côte d’Ivoire en l’enseignant également dès l’éducation secondaire, quiconque connaît un peu l’histoire de ce pays ne peut s’empêcher d’y voir comme la réparation d’une “injustice” où, à tout le moins, une manière de “rendre à César ce qui est à César”. Ainsi, pour Koffi (2004, p. 78), « le développement de l’enseignement de la langue portugaise dans notre région est synonyme d’une réhabilitation de la vérité historique et d’une réoccupation du terrain qui était le sien entre les XVe et XVIIe siècles ».

En le disant, Koffi pense à la Côte d’Ivoire, mais aussi à d’autres pays tels que le Ghana, le Bénin ou le Togo pour lesquels on retrouve des traces du portugais jusque dans les noms de famille (Dalmeda, Vieira, Da Silva, De Campos, etc.) (Koffi, 2010,

p. 300). L’idée « d’une réoccupation [par le portugais] du terrain qui était le sien entre les XVe et XVIIe siècles » n’est pas sans rappeler la rivalité historique entre le Portugal et l’Espagne, d’autant que ce terrain pédagogique est déjà en grande partie occupé par la langue espagnole.

Il est vrai, l’anglais et l’allemand sont aussi présents dans les programmes scolaires en Côte d’Ivoire depuis avant l’indépendance du pays en 1960. Mais, lorsque l’intégration du portugais sera effective, ces langues n’en subiront quasiment aucun impact, numériquement parlant tout au moins. L’anglais est déjà la première langue vivante obligatoire pour tous les apprenants. Quant à l’allemand, supplanté par l’espagnol depuis des décennies, il semble, de fait, hors de course désormais.

Pour l’espagnol, en revanche, le portugais apparaîtra comme un concurrent du même “gabarit”, notamment parce qu’il s’agit également d’une langue néolatine. Car en effet, si les apprenants ivoiriens ont souvent préféré l’espagnol à l’allemand du fait de ses similitudes avec le français, le portugais, langue de la même famille néolatine, bénéficiera à son tour de ce statut, en plus de l’avantage d’une plus grande présence sur le continent africain en tant que langue officielle de cinq pays, sans compter son actif historique relevé quelques paragraphes plus tôt.

Ce faisant, les termes du Traité de Tordesillas se transposent symboliquement sur le terrain éducatif: l’Afrique au portugais et l’Amérique à l’espagnol. Selon l’Institut Cervantès (2022, p.5), d’ici à 2060, les États-Unis seront le deuxième pays hispanophone au monde après le Mexique, avec 27,5% de sa population d’origine hispanique. Si cette influence grandissante de la langue de Cervantès aux États-Unis s’inscrit bien dans les clauses de Tordesillas, ce ne semble pas tout à fait le cas de sa percée spectaculaire en Costa do Marfim, et en Afrique en général. Pour autant, cette


sorte de violation moderne du traité historique n’est pas imputable aux successeurs d’Isabelle de Castille et de Ferdinand d’Aragon ; la France en est l’instigatrice.

Comme on le sait, l’ex puissance coloniale a introduit l’espagnol comme langue étrangère en Côte d’Ivoire dans le dos de l’Espagne qui avait tourné le dos à l’Afrique pour s’investir corps et âme dans la conquête et l’exploitation du Nouveau Monde. Sur ce coup, difficile de ne pas penser à une certaine « philosophie du dos » développée par le professeur Boa-Thiémélé (2021). Dans les années 1940-1950 qui voient l’introduction de l’espagnol dans le secondaire ivoirien, en effet, la dictature franquiste (1939-1975) occupait suffisamment l’Espagne à l’intérieur pour qu’elle pense à promouvoir sa langue et à sa culture à l’extérieur.


CONCLUSION

Au bout de la réflexion, il est clair que, avec l’intégration du portugais, trois langues vivantes 2 devront à l’avenir se partager l’ensemble des élèves dans le secondaire ivoirien, ce qui entraînera inévitablement un ralentissement progressif de l’augmentation du nombre d’apprenants d’espagnol en Côte d’Ivoire. On le ressentira au fur et à mesure que le nombre de professeurs de portugais ira crescendo. Ce qui est moins sûr, en revanche, c’est que cela puisse véritablement remettre en cause le leadership de la Côte d’Ivoire en Afrique en matière d’enseignement-apprentissage de l’espagnol, surtout si les autres pays qui ne l’ont pas encore fait se mettent aussi au portugais. Ce sera également la source d’une saine concurrence dont pourront bénéficier de diverses façons les apprenants et enseignants de l’une et l’autre langue. Ainsi, en dépit de l’avance considérable de l’espagnol en termes de nombre de locuteurs, de prestige international et d’implantation en Côte d’Ivoire au point de prêter des mots au nouchi, le portugais sera le bienvenu, pour des raisons largement exposées tout au long de ce travail. Le renforcement de son enseignement aura, par ailleurs, le double bénéfice de nous faire faire un pas de plus dans la globalisation, en contribuant à briser la barrière linguistique entre nous et plusieurs pays africains au moment où l’intégration africaine tend à vouloir se renforcer. L’apprentissage et la connaissance des langues étrangères est en effet le moteur du phénomène de la globalisation ; « que les frontières géographiques sautent, la mondialisation ne tiendra toutes ses promesses que si les frontières linguistiques tombent également » (Djandué, 2013, p. 5).

En même temps, pour éviter de nous présenter les mains vides à ce grand rendez-vous planétaire du donner et du recevoir, il faudra aussi faire de la place à nos propres langues et aux langues africaines dans notre système éducatif. C’est à ce prix aussi que l’Afrique ne sera pas une victime de la mondialisation comme elle le fut de la colonisation, mais un acteur parmi tant d’autres.


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